19/06/2014

Affaire Karen Millen : les bons conseils de mode sur le caractère individuel

L’avocat général Melchior Wathelet a rendu ses conclusions dans l’affaire Karen Millen (CJUE, 2 avr. 2014, aff. C-345/13).

Il estime que le caractère individuel d’un dessin ou modèle communautaire non enregistré (DMCNE) ne peut être mis en cause par un assemblage d’éléments tirés de plusieurs dessins ou modèles antérieurs qui produirait une impression globale semblable. Il considère par ailleurs que le caractère individuel d’un DMCNE n’a pas à être prouvé par son titulaire qui agit en contrefaçon.

Karen Millen est une entreprise anglaise réputée, qui fabrique et vend des vêtements féminins. En 2005, elle crée et met en vente un chemisier rayé bleu, le même en brun, ainsi qu’un haut noir en maille. L’année d’après, elle s’aperçoit que ces modèles ont été copiés par Dunnes, une importante chaîne de grands magasins irlandaise, qui vend notamment des vêtements.

Karen Millen agit alors en contrefaçon contre Dunnes. L’entreprise copiée affirme être titulaire de DMCNE sur les modèles en cause. De son côté, l’entreprise copieuse reconnaît volontiers son forfait (difficile de nier l’évidence, isn’t it ?!), mais elle estime que ces modèles sont libres de droits et peuvent donc être librement reproduits. Pourquoi ? Parce qu’un modèle non enregistré, tout comme un modèle enregistré au demeurant, doit non seulement être nouveau, mais aussi posséder un caractère individuel pour être protégé au titre des DMCNE (Règl. n° 6/2002 du 12 décembre 2001 sur les dessins ou modèles communautaires [RDMC], art. 6)...

***

L’affaire Karen Millen est ainsi une saga judiciaire irlandaise qui a débuté il y a sept ans. Elle se poursuit à Luxembourg-Ville, à la Cour de justice de l’Union européenne, avec les conclusions de l’avocat général Melchior Wathelet... en attendant la suite. Si ces conclusions sont suivies par la Cour, l’action en contrefaçon des dessins ou modèles communautaires des dessins ou modèles communautaires non enregistrés (DMCNE) sera facilitée. Et le contentieux aujourd’hui clairsemé pourrait bien s’amplifier. C’est dire l’importance de suivre ce fashion litige, centré sur la fameuse exigence de caractère individuel .

En deux points :

(1) le caractère individuel d’un DMCNE ne peut être mis en cause par un assemblage d’éléments tirés de plusieurs dessins ou modèles antérieurs ;

(2) le caractère individuel d’un DMCNE n’a pas à être prouvé par son titulaire.

À lire dans la revue Propriété industrielle,
rubrique "Dessins et modèles" ! 


Karen Millen  à gauche, Dunnes à droite

Références : Laure MARINO, Affaire Karen Millen : les bons conseils de mode sur le caractère individuel (note sous CJUE, conc. av. gén. M. Wathelet, 2 avr. 2014, aff. C-345/13, Karen Millen Fashions Ltd c/ Dunnes Stores, Dunnes Stores [Limerick] Ltd : Propriété industrielle n° 6, juin 2014, comm. 51.

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